#11 Les femmes sont-elles moins intelligentes que les hommes ? (avec Marie Cay et Théa Lime-Lyet)
Sur la balance, le cerveau des femmes est en moyenne plus léger que celui des hommes de quelques dizaines de grammes. Sont-elles alors moins intelligentes ? Le cerveau a-t-il un genre ?
Les préjugés sur les différences entre les femmes et les hommes ont la vie dure. La science est, depuis des siècles, le terrain de jeu des idées reçues et entretient ainsi de nombreuses croyances qui influencent et impactent de nombreuses facettes de nos vies, de l’estime de soi à notre carrière professionnelle. On a intériorisé, la faute à un conditionnement très marqué, qu’en tant que femmes, on était moins intelligentes que les hommes. On a intériorisé le fait qu’on était plus émotives, et surtout, on en a fait quelque chose de mal : comme si c’était une mauvaise chose d’avoir des émotions !
Marie Cay et Théa Lime-Lyet ont publié le 2 septembre chez Mango, le livre “Nos corps révélés” dans lequel elles souhaitent réconcilier masculin et féminin en étudiant les cinq grandes différences entre les sexes (le cerveau, les hormones sexuelles, les organes sexuels, la poitrine et la pilosité), et de décortiquer tout ça pour mieux comprendre le corps et ses mécanismes. Elles sont aussi remontées dans l’histoire pour déceler les rôles que pouvaient avoir l’environnement, les mœurs ou encore l’éducation sur nos habitudes, nos croyances et sur notre perception de ce que l’on appelle “masculin” et “féminin”.
Les préjugés ont la vie dure …
Depuis des siècles, on se rend compte que l’éducation et les attentes genrées de la société ont créé des cases binaires : féminin et masculin. On attend des hommes qu’ils soient virils, forts, puissants, conquérants et leur physique doit s’y accorder : grand, musclé, poilu, mais pas trop. A contrario, les femmes doivent être douces, à l’écoute, bienveillantes, maternantes. Leur physique doit également aller dans ce sens : plus petite, épilée, bien apprêtée, avec des formes, mais pas trop. Ces comportements genrés et attendus impactent le physique, mais aussi la confiance en soi, les perspectives d’avenir, les chances d’être embauché•e ou non à tel ou tel poste, la crédibilité dans certaines situations.
Si certaines personnes ne remettent pas en question ces cases (et c’est okay !), d’autres ne s’y retrouvent pas du tout et peinent à en sortir. Aujourd’hui, la notion de genres a considérablement évolué et une conception binaire aussi stricte enferme les individus dans des cases. De plus, ces préjugés tendent à stigmatiser ou excuser certains comportements. Par exemple : “les femmes sont instables émotionnellement pendant leurs règles, donc leur crédibilité est mise à mal. Les hommes sont par nature impulsifs, donc ils ne font pas vraiment exprès d’être violents”.
Il est donc plus que nécessaire d’en finir avec ces préjugés, d’apprendre à comprendre l’autre, d’en finir avec l’opposition femme-homme et surtout de mettre en lumière l’incroyable diversité des genres !
Les femmes sont-elles moins intelligentes que les hommes ?
Oui… Si on se réfère aux vieilles rumeurs des années 1990 ! Pendant longtemps les études sur la perception, la cognition, la mémoire et les fonctions neuronales auraient révélé des différences entre les sexes. C’est comme ça que sont nés les stéréotypes de genre liés à notre cerveau ! Et les médias ne se sont pas privés pour s’accaparer ces résultats pour les alimenter, sans trop questionner les limites et les travers de ces études.
Cependant, ces dernières ont été largement remises en question et les différences qu’elles soulignent ne seraient en réalité qu’apparentes.
À la naissance, nous avons tous·tes cent milliards de neurones (oui, c’est beaucoup !) et notre cerveau continue de se construire et on estime, dans le cerveau adulte, le nombre de synapses à un million de milliards. Peu importe notre genre !
Contrairement à ce qu’ont bien voulu nous faire croire les anciens résultats scientifiques, les connaissances actuelles sur le cerveau, son développement et sa plasticité montrent que les femmes et les hommes ont les mêmes capacités et que l’apprentissage et les expériences ont un rôle qu’on ne peut pas nier dans la construction de nos cerveaux.
Alors non, les femmes ne sont pas moins intelligentes que les hommes !
Un cerveau plus petit pour les femmes …
Sur la balance, le cerveau des femmes est en moyenne plus léger que celui des hommes de quelques dizaines de grammes. Cela s’explique par le fait que le cerveau est proportionnel à la taille de la boîte crânienne et donc à la stature de la personne. Les anciennes études qui avaient mis en lumière cette différence baignaient dans une époque où la femme était reléguée au foyer et les scientifiques (hommes, évidemment…) ont alors appuyé des théories selon lesquelles ce “petit” cerveau féminin engendrait des compétences moins importantes.
Mais avec les techniques modernes d’imagerie cérébrale et de récentes études en neurosciences, il a été démontré depuis que les compétences s’acquièrent surtout avec l’apprentissage et l’environnement. Et mieux encore : ces connexions cérébrales n’ont aucune incidence sur la masse du cerveau ! La taille n’a donc aucune importance et ne doit en aucun cas servir de prétexte pour rabaisser les femmes sur leurs capacités et plein potentiel.
Le cerveau a-t-il un genre ?
À la question : le cerveau a-t-il un genre ? La réponse scientifique est oui et non. Oui, car il contrôle les fonctions associées à la reproduction sexuée. Et non, car tous les cerveaux sont différents, même ceux des vrais jumeaux !
Même si pendant de nombreuses années, la pensée collective était que les cerveaux masculins et féminins présentaient des différences notables, beaucoup d’études scientifiques plus récentes sont venues réfuter ces croyances. En réalité, il existe tellement de différences entre le cerveau des personnes d’un même sexe, qu’elles dépassent généralement les différences entre les sexes ! Nos aptitudes cognitives résultent en grande partie des expériences acquises et de la plasticité cérébrale dont est capable notre incroyable cerveau.
Dans notre société où les stéréotypes de genres sont bien ancrés, nous sommes éduqué•es différemment selon que l’on est perçu•es comme une femme ou comme un homme. Cela entraînerait, en grandissant, des aptitudes différentes dans certains domaines, et ce malgré des capacités initiales similaires.
Ce n’est pas notre cerveau qui influence nos comportement mais bien notre éducation et notre conditionnement …
Nos organes génitaux externes sont souvent perçus, pendant la grossesse ou dès la naissance, comme seul indicateur de notre genre. Un bébé naît avec une vulve : c’est une fille. Un bébé naît avec un pénis : c’est un garçon. À partir de là, l’éducation que nous recevons, les modèles que nous prenons, l’environnement dans lequel nous évoluons sont encore basés sur une société binaire homme-femme, masculin-féminin. Ces deux pôles sont différenciés par tout un tas de marqueurs : attitude, morphologie, caractère, style vestimentaire, pilosité, centres d’intérêt, etc. Nous sommes alors associé•es soient à l’un soit à l’autre selon notre sexe biologique observé.
Et nous le savons, le grand lecteur du monde qui nous entoure, c’est le cerveau. On sait aujourd’hui à quel point il est malléable et formaté par l’apprentissage. Dès les premières semaines de vie, il commence déjà à tout analyser, à comprendre, à décrypter, à mettre en opposition. Selon l’éducation genrée que nous recevons et des attentes, même inconscientes, que le monde extérieur pose sur nous, nous sommes guidé•es à agir comme une fille ou comme un garçon.
Ainsi, si en tant que garçon cisgenre, on nous apprend à ne pas pleurer, à être fort, à se défendre par la violence, à ne pas parler de nos émotions, il y a de grandes chances pour que l’on continue d’agir ainsi à l’âge adulte. De même si l’on est une fille cisgenre à qui on apprendrait à être empathique, à materner, à avoir un attrait pour les vêtements, notre comportement et nos habitudes une fois adulte évoluent dans ce sens.
Le mythe des femmes sensibles et des hommes courageux prend encore beaucoup de place dans notre société, le cerveau n’a aucun lien avec celui-ci. Puisque le cerveau n’a pas de genre, il ne peut pas être à l’origine d’une différence émotionnelle entre personnes perçues comme femmes et celles perçues comme hommes.
Pour résumer, c’est notre sexe biologique qui induit une certaine éducation et donc guide nos réactions et comportements. Mais à la naissance, peu importe notre sexe, nous naissons toutes et tous avec les mêmes aptitudes. Le cerveau est vierge de tout stéréotype de genres !
Le cerveau a bien un rôle dans notre perception des éléments qui nous entourent et dans nos réactions à celles-ci. Nos émotions sont contrôlées par le cerveau et ce quelque soit notre genre ! Encore une fois, la plasticité cérébrale et l’éducation genrée que nous recevons est généralement à la base d’une sensibilité plus développée (car plus acceptée et inculquée) chez les femmes que chez les hommes.
Retrouvez Nos corps révélés par Marie Cay et Théa Lime Lyet paru chez Mango Society - dispo sur internet (sur Place des Libraires par exemple) et en librairie.
🗓 RDV mardi 20 septembre pour la prochaine newsletter “Hum hum, et si on parlait de sexe ?” !